Simon Scheidegger. Bildnachweis: Silvia Meierhofer.

Selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), on compte 1,8 millions de personnes handicapées en Suisse, correspondant à un cinquième de tous les habitant·e·s. Notre perception nous laisse à penser que c’est un chiffre étonnamment élevé, ce qui montre bien que les personnes en situation de handicap ne sont pas du tout le « groupe marginal » souvent représenté dans la société. Le pouvoir du langage est indéniable, et considérable. C'est le pouvoir qui façonne la conscience et l’opinion des gens, consolide les préjugés, suscite les angoisses. Ou le contraire : qui fait naître l’empathie et la compassion, stimule l’ouverture d'esprit et crée chez tous·tes le sentiment d’être accueilli·e et entendu·e.

Mais le langage est aussi quelque chose de dynamique, un organisme vivant. Les mots qui, il y a dix ans, étaient encore acceptés par la société, ne le sont peut-être plus aujourd’hui. Car le langage évolue en fonction des personnes qui l’utilisent.

Destin et inspiration

Lorsque le langage tourne autour du thème du handicap, l’un ou l’autre doute est souvent de mise : Comment parler « correctement » de ce sujet d’un phénomène de société, comment le traiter dans les médias ? « Correctement » signifie dans le meilleur des cas « sans aucune discrimination » et sans crainte de reproduire et nourrir les peurs et les préjugés.

Mais que cela signifie-t-il exactement ? Et comment peut-on y parvenir ? Il y aurait d’innombrables exemples tirés du quotidien et des médias pour illustrer les moyens de communiquer des informations sans discrimination et préjugés ; il serait d’ailleurs intéressant que ceux-ci fassent un jour l’objet d’un doctorat sur la construction discursive du handicap en Suisse. Dans notre cadre limité dans le temps et l'espace, nous n'avons pu sélectionner que quelques exemples et réflexions.

Dans les médias, on trouve encore aujourd’hui deux manières de parler des personnes en situation de handicap (1). La différence a déjà été discutée dans les pays anglophones et germanophones au fil de la recherche dans le cadre de ce qu’on appelle les Disability Studies. Soit on présente l’image d’une personne qui « souffre » de son handicap, soit la personne en situation de handicap apparaît comme un super héros ou une super héroïne qui vit sa vie « malgré son handicap ». L’une des figures de style les plus populaires consiste à construire une histoire dramatique touchante. L’histoire est particulièrement émouvante lorsque la personne décrite est handicapée depuis un accident. On peut ensuite raconter le destin tragique de cette personne avec force détails, en particulier combien elle a eu du mal à retrouver une vie après l’évènement. Et voilà le tapis déroulé : on peut considérer la vie de cette personne particulièrement triste, éprouver de la pitié, ou alors puisque le destin de cette personne est tellement dramatique, y trouver une inspiration.

(1) « Les personnes handicapées » serait également une dénomination légitime. Ce serait là un exemple de « identity-first language » tandis que « personnes en situation de handicap » est ce qu’on appelle « person-first language ». Point négatif pour cette dernière dénomination : l’ajout des mots « en situation de » crée une distance avec le handicap, ce qui traduit une certaine peur du contact alors que l’« identity first language » est plus direct et plus exact. D’une manière générale, il est toujours préférable de demander aux personnes concernées quelle dénomination elles préfèrent.

Prison et chaînes

L’argument selon lequel le fait de susciter la pitié permet de générer des fonds qui profitent aux personnes en situation de handicap est bien entendu régulièrement avancé lorsqu’on opte pour cette approche. Et c'est effectivement le modèle économique adopté par de nombreuses organisations et associations de personnes en situation de handicap depuis des lustres. Par exemple, sur des affiches et dans des spots publicitaires de l’une des plus importantes associations, on peut lire « Je n'y peux rien ! », qui crée une analogie entre les personnes en fauteuil roulant et de malheureux innocents qui ont atterri en prison. Mais un fauteuil roulant est-il une prison ? N'est-ce pas plutôt une aide donnant à des millions de personnes dans le monde une certaine indépendance et liberté, et devenant donc par là le contraire d’une prison ? Une autre métaphore entraînant la même association d’emprisonnement : « être enchaîné à son fauteuil roulant », souvent employé pour décrire les personnes se déplaçant de cette manière. Souvent sans arrières-pensées ou sans penser à mal, simplement parce qu’ « on dit ça comme ça » ou qu’« on a toujours dit ça comme ça ». Beaucoup n’ont simplement pas conscience que cette métaphore est erronnée, ce qui prouve combien l’image stéréotypée « handicap = souffrance » est profondément enracinée et normalisée dans les esprits.

Revenons aux médias et à l’information. Outre la construction d’histoires dramatiques, on peut constater dans l’usage qu’une multitude d’euphémismes est utilisée dans le but d’éviter un mot à tout prix : « handicap ». C'est ainsi qu’on va par exemple parler de « déficience », « limitations », « difficultés », « besoins spécifiques », « facultés spéciales », « particulier ». Il n'existe pratiquement aucune limite à la créativité. De tels euphémismes sont avant tout l'expression du doute et de la peur. Les personnes qui ne sont pas en situation de handicap y ont recours parce qu’elles supposent que c'est mieux comme ça. Mais c'est l’inverse qui est vrai. Ces euphémismes tendent à propager dans les esprits le fait que le handicap est mauvais et qu’il faut l’éviter à tout prix, sous peine d’une vie qui n’en « vaille plus la peine ». Cette attitude négative envers le handicap se retrouve également dans le langage des jeunes qui, depuis des décennies, utilisent le terme pour dénigrer, connoter négativement et insulter. On observe par conséquent que même les personnes concernées évitent le terme, ce qui apparaît alors comme une légitimation du mode de pensée et de l’attitude aux yeux des personnes non-handicapées. Il s’agit ici simplement du phénomène de « validisme internalisé ». Pour simplifier, le validisme désigne la discrimination en raison d’un handicap. Cela implique justement l’hypothèse que le handicap en soi est quelque chose de négatif qui doit être évité — non seulement dans le langage, mais d’une manière générale.

L’exemple des lunettes

Il est important de se débarrasser de ces peurs et de désigner le handicap comme tel. Au final, le handicap est la caractéristique d’une personne, tout comme l’est la couleur de cheveux. Le handicap fait partie d’une personne comme toutes les autres choses qui la rendent unique. Il n'est pas pour autant la source d’une histoire tragique et inspirante qui n’est perçue comme telle qu’en raison d’opinions stéréotypées basées sur des doutes et des peurs. Un jeu d’esprit : les lunettes sont un accessoire qui simplifie la vie de nombreuses personnes. Est-ce que quelqu’un·e a jamais eu l’idée de demander à un·e porteur·euse de lunettes s’il était difficile de ne pas bien voir sans ses lunettes ? Ou bien ce qui lui était arrivé pour avoir besoin de lunettes ? Ou bien de proclamer combien ce porteur de lunettes était inspirant lorsqu’il osait se mêler à d’autres, aller à un concert, au restaurant, sortir en club malgré ses lunettes ? Ce serait bien absurde, puisque la société considère les lunettes comme un accessoire normal. Ce n'est que lorsqu’il en sera de même pour les autres moyens d’aide utilisés par les personnes handicapées sous quelque forme que ce soit que l’acceptation du handicap en tant que partie prenante de la société sera à un niveau permettant une cohabitation sans discrimination.

Des projets tels que « Reporters sans obstacles » de Inclusion Handicap donnent aux personnes handicapées une chance de transmettre leur vision des choses et de se faire entendre, de remettre en question les structures et mentalités figées, voire de les faire disparaître. En tant que journaliste en fauteuil roulant, je me sens souvent à part dans mon quotidien professionnel. Tout ça pourrait bien changer grâce à ce projet.

«Die Sprache hat Macht. Viel Macht. Sie formt nämlich das Bewusstsein und die Meinungen der Menschen, verfestigt Vorurteile, schürt Ängste.»

Simon Scheidegger, Reporter ohne Barrieren

Sprache ist aber auch dynamisch, ein lebendiger Organismus. Was vor 10 Jahren noch gesellschaftlich akzeptiert war zu sagen, ist es heute vielleicht bereits nicht mehr. Weil Sprache von Menschen gemacht wird.

Schicksal und Inspiration

Wenn die Sprache sich um das Themenfeld Behinderung dreht, ist oft eine Verunsicherung zu spüren, wie «richtig» über Behinderung als gesellschaftliches Phänomen gesprochen und in den Medien berichtet wird. «Richtig» hiesse im Optimalfall «diskriminierungsfrei» und ohne Ängste und Vorurteile zu reproduzieren und diese durch die Reproduktion weiter in den Köpfen der Menschen zu verfestigen.

Doch was bedeutet das überhaupt? Und wie kann das erreicht werden? Es gäbe zig Beispiele aus dem Alltag und den Medien, anhand welcher Wege und Strategien zu einer diskriminierungs- und vorurteilsfreien Berichterstattung aufgezeigt werden könnten, und diese sollen irgendwann auch im Rahmen einer Doktorarbeit zur diskursiven Konstruktion von Behinderung in der Schweiz aufgearbeitet werden. In diesem beschränkten Rahmen bleibt aber nur Zeit und Raum für ein paar ausgewählte Beispiele und Gedanken.In den Medien sind immer noch zwei Muster der Berichterstattung über Menschen mit Behinderung (1) feststellbar.

«In den Medien sind immer noch zwei Muster der Berichterstattung über Menschen mit Behinderung feststellbar.»

Simon Scheidegger, Reporter ohne Barrieren

Vorab im englischsprachigen und auch im deutschsprachigen Raum wurde dies in der Forschung, den sogenannten Disability Studies, schon oft gezeigt. Entweder wird das Bild eines Menschen gezeichnet, der unter seiner Behinderung «leidet». Oder der Mensch wird als Superheld dargestellt, der sein Leben «trotz seiner Behinderung» meistert. Ein beliebtes Stilmittel ist es, eine berührende Schicksalsgeschichte zu konstruieren. Besonders gut geht das natürlich, wenn die zu porträtierende Person aufgrund eines Unfalls mit einer Behinderung lebt. Detailgenau kann dann nacherzählt werden, welche Tragik der Person widerfahren und wie schwierig es danach gewesen sei, wieder ins Leben zu finden. Schon ist der Teppich ausgelegt, das Leben der Person als besonders schlimm auszulegen, Mitleid zu empfinden oder gerade weil einer Person so etwas widerfahren ist, sie als Inspiration zu sehen.

(1) «behinderte Menschen» wäre ebenfalls eine legitime Bezeichnung. Dies wäre ein Beispiel für «identity-first language» während «Menschen mit Behinderung» sogenannte «person-first language» ist. Kritikpunkt an letzterer ist, dass durch das Einfügen des Wortes «mit» eine Distanz zu Behinderung hergestellt werde, wodurch auch gewisse Berührungsängste manifestiert würden, während «identity-first language» direkter und genauer sei. Grundsätzlich ist stets bei Betroffenen zu fragen, welche Bezeichnungsart gewünscht sei.

Gefängnis und Fesseln

Diese Herangehensweise kann und wird natürlich verteidigt mit dem Argument, dass durch das Hervorrufen von Mitleid Gelder generiert werden, die Menschen mit Behinderung zugutekommen. Das ist seit Jahr und Tag das Geschäftsmodell von vielen Behindertenorganisationen und -vereinigungen. Zum Beispiel, wenn es auf Plakaten und in Werbespots einer der grössten Vereinigungen überhaupt heisst, «Ich sitze unschuldig» und dadurch eine Analogie von Rollstuhlfahrenden zum «im Gefängnis sitzen» hergestellt wird. Aber ist der Rollstuhl ein Gefängnis? Ist er nicht vielmehr das Hilfsmittel, das Millionen Menschen weltweit Unabhängigkeit und Freiheit ermöglicht und dadurch das Gegenteil eines Gefängnisses verkörpert? Eine Metapher, die dieselbe Assoziation des Gefangenseins hervorruft, ist «an den Rollstuhl gefesselt», welche immer wieder verwendet wird, um Rollstuhlfahrende zu beschreiben. Oft ohne Hintergedanken oder böse Absicht, sondern einfach «weil man das so sagt» oder «schon immer so gesagt hat». Wie falsch diese Metapher aber im Grunde ist, ist vielen nicht bewusst, was belegt, wie tief verwurzelt und normalisiert das stereotype Bild von «Behinderung = Leid» in den Köpfen der Menschen ist.

«Neben konstruierten Schicksalsgeschichten ist im Sprachgebrauch feststellbar, dass eine Vielzahl von Euphemismen verwendet werden, mit dem Ziel, ein Wort um jeden Preis zu verhindern: Behinderung.»

Simon Scheidegger, Reporter ohne Barrieren

Zurück zur Berichterstattung. Neben konstruierten Schicksalsgeschichten ist im Sprachgebrauch feststellbar, dass eine Vielzahl von Euphemismen verwendet werden, mit dem Ziel, ein Wort um jeden Preis zu verhindern: Behinderung. Da heisst es dann beispielsweise «Beeinträchtigung», «Einschränkung», «Handicap», «spezielle Bedürfnisse», «spezielle Fähigkeiten», «besonders» - der Kreativität sind fast keine Grenzen gesetzt. Solche Euphemismen sind aber vor allem ein Beleg der Unsicherheit und Angst. Sie werden von Nicht-Behinderten ins Leben gerufen in der Annahme, etwas Gutes zu tun. Dabei bewirken sie das Gegenteil. Sie führen dazu, dass Behinderung in den Köpfen der Menschen etwas Schlechtes ist, das um jeden Preis vermieden werden muss, weil sonst das Leben «nichts mehr wert» ist.

Diese negative Grundhaltung gegenüber Behinderung spiegelt sich auch darin, dass «behindert» seit Jahrzehnten vorab in der Jugendsprache als abwertender, negativ konnotierter Begriff und als Beleidigung verwendet wird. Dies hat dazu geführt, dass selbst bei Betroffenen eine Vermeidung dieser Begriffe beobachtet werden kann. Was dann von Nicht-Behinderten wiederum als Legitimation für ihre Denk- und Vorgehensweise verstanden wird. Im Grunde ist es aber einfach das Phänomen des «internalisierten Ableismus». Vereinfacht bezeichnet Ableismus die Diskriminierung aufgrund einer Behinderung. Dies beinhaltet eben auch die Annahme, dass Behinderung per se etwas Negatives ist, das vermieden werden muss - nicht nur sprachlich, sondern überhaupt.

«Behinderung ist im Grunde eine Eigenschaft einer Person wie die Haarfarbe.»

Simon Scheidegger, Reporter ohne Barrieren

Die Brille als Vorbild

Es ist wichtig, diese Ängste abzulegen und Behinderung auch als solche zu bezeichnen. Denn Behinderung ist im Grunde eine Eigenschaft einer Person wie die Haarfarbe. Sie gehört zu einem Menschen dazu wie alles andere, was ihn einzigartig macht, ist aber deswegen nicht die Quelle für eine inspirierend-tragische Geschichte, die nur aufgrund von stereotypisierenden, auf Unsicherheiten und Ängsten basierenden Meinungen überhaupt als solche wahrgenommen wird. Ein Gedankenspiel: Eine Brille ist ein Hilfsmittel, das das Leben vieler Menschen einfacher macht. Käme jemand auf die Idee, Brillenträger:innen zu fragen, wie schwierig es für sie ist, ohne Brille nicht gut sehen zu können? Oder was ihnen passiert ist, dass sie eine Brille brauchen? Oder zu sagen, wie inspirierend sie doch seien, dass sie sich trotz ihrer Brille unter die Leute, an Konzerte, ins Restaurant, in einen Club wagen würden? Das wäre wohl ziemlich absurd. Weil Brillen gesellschaftlich als Hilfsmittel akzeptiert sind. Erst wenn das bei anderen Hilfsmitteln, die einen als in irgendwelcher Form behinderter Mensch unterstützen, auch so ist, ist die Akzeptanz von Behinderung als gesellschaftliches Phänomen auf einem Niveau, dass ein diskriminierungsfreies Leben miteinander möglich wird.

Projekte wie «Reporter:innen ohne Barrieren» von Inclusion Handicap geben Menschen mit Behinderung eine Chance, ihre Perspektive einzubringen und gehört zu werden, verfestigte Strukturen und Denkweisen aufzuweichen und ganz verschwinden zu lassen. Als rollstuhlfahrender Journalist fühle ich mich heute im Arbeitsalltag oft als Exot. Dank dieses Projekts könnte das schon bald nicht mehr so sein.